B1BC Mushroom soul: Interview de bibi Tanga

Interview de bibi Tanga

mercredi 5 décembre 2007

Bibi Tanga et le professeur Inlassable (producteur) ont sorti en septembre "Yellow Gauze", un album sans aucune règles ni limites, où se mélangent funk, groove, electro, hip hop, jazz, musique africaine et gospel. Nous avons, pour l'occasion, rencontré Bibi Tanga et le professeur Inlassable dans les locaux du label de ce drenier, l'inlassable disque. Retour sur la rencontre des sons, des personnes et des univers.





Qui est bibi tanga ?

Musicien, auteur, interprète, c'est comme ça qu'on dit, je crois! Compositeur aussi. C'est assez long à expliquer, je vais faire un speech rapide. En 2000 j'ai sorti un disque avec la Malka Family qui s'appelle "Le vent qui souffle". Depuis il y a eu un groupe qui s'est formé et qui s'appelle les Gréements de Fortune. Et la rencontre avec Jean, enfin le Professeur Inlassable, parce qu'il ne veut pas révéler son nom. Et on a commencé à jouer ensemble dans son studio et au bout de ça il y a eu tellement de morceaux faits, qu'on a décidé d'en faire un album.

Quelle est l'évolution depuis ton premier album?

Je ne vais pas dire plus de maturité car il y a forcément de ça. J'étais peut-être un peu moins professionnel, même si on l'est de toute façon un peu moins avant. Là, ça touche un peu plus au coeur de toute ma discographie on va dire, de tous mes goûts musicaux. C'est un peu plus large.

Comment s'est passée la rencontre avec le Professeur Inlassable ?

Et bien, c'est un ami en commun en fait qui un jour m'a amené ici (les locaux du label et studio dans le 6ème), et m'a dit "il faut que je te fasse rencontrer quelqu'un". Et je suis arrivé ici un soir, on a fait une jam session ensemble et on s'est plus jamais arrêtés.

C'est comme ça que vous avez fait l'album ?

Oui voilà, comme les jam sessions qu'on faisait ensemble se passaient bien, on a continué sans avoir l'idée de faire un album. Ca a duré comme ça presque deux ans, on se voyait un peu, parfois on se voyait pas pendant un mois. Et c'était plus comme une récréation, et donc de récréations en récréations, finalement on a rendu une copie.

Donc c'était pas, "on fait un album là"...

Non pas du tout, on s'est rendu compte qu'on avait vraiment beaucoup de morceaux et qu'il fallait juste un peu les réarranger.

Cet album est beaucoup plus large que le premier, on a un peu du mal à le résumer en tous cas, il y a de tout, jazz, hip hop, blues, gospel, electro...

Bah ouais, je pense que c'est lié à mon parcours et l'éducation de mes parents. Je pense aussi que c'est pareil pour le Professeur Inlassable. Comme on a écouté beaucoup de choses et qu'on aime beaucoup de choses. A partir du moment où tu improvises, tu aimes improviser sur des trucs un peu plus hip-hop, ou autre. Et lorsque tu fais de la musique sincèrement, on y retrouve toutes tes influences. Après c'est vrai qu'il y a des musiciens qui préfèrent, qui sont exclusivement hip hop ou autre. C'est pas trop ma démarche. J'aime la musique.

Tu chantes en plusieurs langues, en Français, en Anglais, en Sango (sa langue natale). C'est important pour toi de chanter dans ces trois langues?

Carrément, parce que les premiers artistes que j'ai vraiment admirés, c'était des artistes anglophones Bob Marley, James brown, Jimi Hendrix, enfin j'en passe et des meilleurs. Et aussi des artistes Africains. Et je suis en France donc..

Il y a quand même qu'un texte en Français...

Euh (Rires) oui ! Mais comme le premier était un album complètement en Français, je me suis dis que ce serait un peu brutal de ne plus en mettre du tout et puis j'avais vraiment envie de mettre ce morceau, "Au Fil du temps". Mais je pense que c'est beaucoup plus naturel pour moi de chanter en Sango, car quand je suis avec mes soeurs par exemple on parle souvent en Sango.

Il y a des traductions dans le livret ?

C'est une bonne question. Je vais te dire de suite – il prend le disque au dessus d'une grande pile de CD – Et non il n'y a pas de traduction, pas de livret dans le disque.
Je vais te dire rapidement alors, "Ayo" c'est plus un chant mortuaire. "Ayo" c'est un peu le mot qu'on utilise pour témoigner sa compassion à quelqu'un à qui il est arrivé un malheur, comme si on dit "oh le pauvre". Et dans cette chanson là, je cite pas mal de gens de ma famille qui sont décédés, des tantes, des oncles, des grands parents... Mais par exemple ce chant là c'est un peu un chant d'accueil, on fait comme si on était de l'autre côté, on accueille les personnes décédées. C'est un chant qui symbolise ça. C'est comme si on présentait à Dieu cette personne.

Et le dernier morceau ?

Nzapa A bata Mo

Je voulais pas me risquer à le prononcer (rires)

Ca veut dire "que Dieu te garde". Et là c'est pareil, je cite pas mal de gens de ma famille et la par contre je m'adresse directement à eux en leur disant "que Dieu te garde", que tout se passe bien pour eux, qu'ils ne soient pas seuls.

Tu t'inspires de quoi pour tes textes, autre que ce qu'on vient d'aborder. Tu parles un peu de tout, tu prends même des textes d'écrivains.

Oui, par exemple il y a le texte d'Oscar Wilde, il y a aussi des textes de moi. Par contre "Ayo" et "Nzapa A bata mo" c'est le patrimoine, des contes africains. Et il y a aussi le thème sur l'esclavage – "au fil du temps" – qui m'inspire énormément. Quand j'écris c'est vraiment parce que j'ai un truc à dire. Et non pas écrire parce que je dois, sinon je n'y arrive pas.

Tu as un groupe donc, les Gréements de fortune. Le groupe est mis entre parenthèses pour le moment ou pas du tout ?

Non pas du tout, on continue à faire des concerts ensemble, on prépare l'album.

Il va y avoir un album ?

Oui, on le prépare, et y a aussi les anciens membres de Malka, ça va être dans la mouvance Juan Rozoff. L'album est en fin de préparation.

Il est plus funk donc celui-ci ?

C'est vraiment groove pour le coup, funk rock'n'roll. En effet pas comme mon album.

Et pour revenir sur ton album, tu étais le chef d'orchestre ou c'était chacun fait ce qu'il veut ?

Pour la réalisation, en fait on va dire que le point de départ à chaque fois c'est le Professeur. Moi, si ça m'inspirait, je me mettais derrière le micro, après le soir même je mettais une ou deux basses et puis après on ajoutait les autres jours soit un guitariste etc. Donc ça a toujours été comme ça, le professeur, puis moi, etc. Par étape.

C'était donc important de dire que c'est l'album de Bibi tanga ET le Professeur Inlassable.

Bah ouais, c'est deux univers qui se rencontrent.

Le sien assez spécial.

Carrément. Donc oui ce sont ces deux univers qui se rencontrent, donc si on avait laissé que Bibi Tanga, ça n'aurait pas voulu dire grand chose.

Une petite question comme ça, sur les photos tu as une cape, canne et tout, pourquoi ?

Bah ça, c'est avec le professeur, ce côté un peu année 30... C'est important la présentation, c'est aussi un spectacle. On écoute la musique mais on regarde aussi les artistes. C'est vraiment une petite mise en scène.

Comment définirais-tu ton album?

Ouais, c'est toujours le problème...

En effet mais il faut quand même orienter les gens...

C'est un condensé de musiques noires qui épouse des musiques européennes. Un hommage à ça. A toute la culture Black musicale.

Une tournée ?

On a fait un concert à la Cigale.
Et le 6 décembre on fait les Transmusicales à Rennes et très certainement d'autres live radio à venir. Le fou du roi etc.

Un morceau préféré ?

La 12 ("It's the earth that moves") et "au fil du temps". Vu que ce sont des morceaux qui datent, ils ont leur histoire etc, ils ont tous eu leur temps d'amour.



Le Professeur Inlassable entre dans la pièce.
On nous présente et me propose de l'interviewer mais il n'a "pas beaucoup de temps"


Ton univers est assez étrange, à l'écoute de la "leçon numéro 1"... Il y a un peu de tout, de l'electro, jazz, des voix étranges etc. Comment en es-tu arrivé à cet univers ?

Le professeur Inlassable: C'est un univers de mélange dans lequel j'aime bien me mêler, faire rencontrer différents sons, c'est comme faire rencontrer différentes personnes, y en a qui s'harmonisent, et d'autres moins. J'ai un rapport au son comme ça, de rencontre des choses, des voix effectivement, des musiques.

Tu vois donc la musique comme une rencontre ?

Le professeur Inlassable: Oui je suis un peu alchimiste quand même, comme tu vas mélanger des parfums. C'est comme un décor où viennent se greffer des choses.

La "leçon numéro 1" est une leçon de quoi?

Le professeur Inlassable: En fait j'ai pris ce nom, le professeur Inlassable par un objet qu'on ma offert – style année 50-, donc du coup professeur, leçon. C'est plus humoristique. Et Inlassable aussi, car je suis inlassable dans ma démarche sonore. C'est à dire que je peux rester inlassablement dans un son, j'ai pas la notion du temps. Et j'y mélange des choses, des sons, inlassablement!

Un Leçon numéro 2 de prévu ?

Le professeur Inlassable: Oui, c'est en cours, j'aimerais bien la sortir dans 6 mois.

Dans la continuité ?

Le professeur Inlassable: Oui dans la même continuité. Ma démarche c'est d'envoyer des décors répétitifs comme ça. Après tout dépend des gens avec qui je travaille. Comme avec Bibi Tanga.

Le court entretien est fini, petite visite du studio, avec des objets assez rétro, 30's, 50's. A la vue du studio et des deux artistes, on comprend un peu mieux l'atmosphère de l'album.

Interview publiée sur Onlygroove.com

Libellés :